Dans le cadre de son soutien à la qualité de la construction, la DREAL des Pays de la Loire, a participé à un groupe de travail piloté par le parc naturel régional Loire-Anjou-Touraine et a financé une étude d’expertise du CETE de l’Ouest, dont voici l’essentiel des conclusions :
Si les réglementations thermiques ont permis depuis 1975 d’améliorer les performances des bâtiments neufs, c’est bien la rénovation thermique du patrimoine bâti existant qui est aujourd’hui au centre des préoccupations.
Le plan d’investissement pour le logement décliné le le 21 mars 2013 par le président de la République, demande de rénover 500 000 logements par an à compter de 2013.
Le parc bâti français compte 10 millions de logements anciens construits avant 1948, qui possèdent des caractéristiques thermiques complexes et un intérêt patrimonial souvent remarquable.
Ainsi, la région Pays de la Loire comprend de nombreux bâtiments en pierre calcaire de tuffeau, dont toute rénovation doit être mesurée et réalisée dans les règles de l’art.
Afin de répondre aux questions que se posent les professionnels sur les techniques de réhabilitation applicables au tuffeau sans risquer de le dégrader, un groupe de travail s’est constitué en 2010 piloté par le Parc Naturel Régional Loire Anjou Touraine (PNR) [1].
Ces travaux ont proposé une étude sur les techniques de réhabilitation thermique compatibles avec le tuffeau.Cette étude a été confiée par la DREAL au CETE de l’Ouest :
CETE de l’Ouest
Ces travaux d’expertise ont permis d’effectuer :
- un premier état des lieux sur le tuffeau dans le bâti ancien, réalisé par le CETE en 2012,
- un référentiel technique rédigé par le groupe de travail et publié en 2013 sur le site du PNR.
- Des mesures par capteurs également pilotées par le CETE, sur 8 réhabilitations énergétiques sur le territoire du PNR : ce travail donnera lieu à un rapport au second semestre 2013.
L’ensemble des documents sur le groupe de travail tuffeau et le bâti ancien sont à retrouver sur le site de la DREAL Pays de la Loire.
Généralités sur le comportement thermique du matériau tuffeau :
Le tuffeau est une pierre calcaire très tendre et facile à tailler. Il est fortement poreux et a un coefficient de capillarité élevé par rapport aux autres calcaires. Ce qui lui donne une tendance à pouvoir absorber rapidement une grande quantité d’eau. Sa résistance thermique et mécanique se dégrade malheureusement en présence d’humidité. De plus, les parois en tuffeau supportent mal les cycles d’imbibition et de séchage, qui peuvent induire des dégradations des façades : développement de mousses, détachement de plaques, creusement d’alvéoles…
C’est pourquoi il est important de limiter et réguler la pénétration d’eau dans le tuffeau.
Bonnes pratiques à retenir pour les parois en tuffeau :
Les réflexions du groupe de travail du PNR ont permis de retenir quelques principes essentiels à la pérennité des parois en tuffeau :
La première chose à retenir est que la maison ancienne ne cherche pas à « lutter » contre l’humidité mais plutôt à gérer les problèmes qui y sont liés. Dans ce patrimoine, l’eau n’est jamais bloquée mais son cheminement est guidé pour favoriser son évacuation. Les matériaux et enduits utilisés permettent donc à l’eau de transiter.
La pierre de tuffeau est utilisée sous deux formes dans la construction :
En pierre de taille : elle est utilisée principalement sur les maisons bourgeoises, pour les façades visibles, pour les chaînages d’angle et les encadrements de menuiseries.
En moellons : il existe différents types de moellons (équarris : forme parallélépipédique ou bloqués : tels qu’ils ont été extraits). Ils sont mis en œuvre avec ou sans mortier.
1) Bien choisir son enduit :
Ces murs en moellons ont besoin d’un enduit pour les protéger de la pluie. Les enduits anciens sont généralement composés de chaux et sables locaux. La chaux aérienne fait sa prise à l’air et la chaux hydraulique fait sa prise en présence d’eau. Généralement, en milieu rural, le calcaire local est cuit dans un four à proximité du chantier pour donner la chaux. L’enduit ancien est donc bien adapté, car il a une composition chimique très proche de son support. Il a la souplesse nécessaire pour se déformer sans dégrader la pierre.
Attention à ne pas utiliser le ciment en lieu et place de la chaux pour enduire ou jointoyer le tuffeau : La plupart des dégradations de la pierre de tuffeau sont dues à l’utilisation de mortier de ciment dans les restaurations modernes. Des études ont montrées que les caractéristiques chimiques du ciment (sa teneur en sels alcalins) sont incompatibles avec le tuffeau. De plus, les mortiers de ciment sont durs et ont une adhérence élevée, ce qui contribue à augmenter la friabilité de la roche. Enfin, comme le ciment est imperméable, il favorise l’accumulation d’eau dans la pierre et constitue une zone qui augmente la dissolution et la recristallisation.
Sur les moellons de tuffeau, l’enduit doit être très « respirant », et à réaliser en dehors des périodes de gel à partir de chaux aérienne (CL) ou de chaux naturelle faiblement hydraulique (NHL 2).Les sacs de chaux avec l’indice « -Z » contiennent du ciment et sont à proscrire.
En préalable à tout enduit, il faut veiller à limiter les pénétrations d’eau dans le tuffeau :
- assurer la bonne évacuation des eaux pluviales par l’entretien des toitures et chéneaux,
- conservation des corniches et bandeaux,
- drainer les pieds de murs,
- combattre les remontées capillaires en privilégiant les dalles perspirantes à base de chaux ou les terrasse en bois ou en graviers (éviter les trottoirs en bitume ou béton).
2) Bien isoler les parois :
L’apport d’humidité dans la paroi doit être limité, mais il convient de ne pas empêcher l’évacuation par le tuffeau de l’eau qui aura tout de même pu rentrer (vapeur intérieure, remontées capillaires…) C’est pourquoi il convient d’utiliser des isolants à la fois perméables à la vapeur d’eau et en capacité de déstocker l’humidité qui pourrait les atteindre au contact du tuffeau (l’isolant doit être « hygroscopique »)
Rentrent dans cette catégorie les bétons de chanvre, les enduits chaux-chanvre, le béton cellulaire, la fibre de lin ou la laine de bois… En revanche, la laine de verre perd ses capacités isolantes et s’affaisse en cas de contact avec l’eau du tuffeau. Les revêtements intérieurs imperméables sont également à proscrire : peintures non perméables, faïence, enduit ciment…
Toute isolation d’un tuffeau gorgé d’eau est également à éviter (suite à une longue période de remontées d’eau par exemple). Une réflexion particulière doit toujours être menée pour choisir l’isolation qui convient à chaque cas de bâtiment rencontré dans son environnement.
Pour en savoir plus, se référer à la fiche technique n°7 du PNR (http://www.parc-loire-anjou-touraine.fr/fr/telechargements/habitat/referentiel-technique)